Mademoiselle de La Motte, "l’insoumise de Velles" (1589-2013)

  • Crédit photo : E. Hubert 
  • Crédit photo : R. Pecherat 
Mise à jour :
1/7/2013 à 14 h 19
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Le pillage d’une forteresse
En 1437, Jacques de Boisé, écuyer, seigneur du lieu, avait obtenu de Guy III de Chauvigny le droit de « fortifier et emparer son hostel de Corsenay… et faire toutes manieres de fortiffications que a forteresse ». L'imposant édifice, un quadrilatère défendu par une grosse tour, une autre plus petite et une autre carrée et protégé par des douves et un étang, témoigne d'une réelle qualité architecturale. Il fut le théâtre d’un drame un siècle et demi plus tard.

La France était alors divisée entre protestants, qui tenaient pour le nouveau roi Henri IV, leur coreligionnaire, successeur d’Henri III assassiné le 1er août 1589, et Ligueurs, qui refusaient un roi non catholique ; les royalistes formaient un tiers-parti allié aux protestants. Des bandes armées pillaient le pays, les familles nobles s’engageaient de part et d’autre.

Le châtelain de Courcenay, René de Boisé, Ligueur, venait de mourir dans un combat à Neuvy-Pailloux, laissant deux enfants mineurs au « bail » (tutelle) de son beau-frère, Antoine de Saint-Flovier. Mais il avait oublié sa sœur Françoise, nommée « Mademoiselle de La Motte », du nom d’un fief voisin, qui habitait le château voisin de Beauregard. Jalousie, conviction politique, ou peut-être recherche d’un trésor enfoui ? Le 5 décembre 1589, une troupe d’aventuriers s’emparait du château, expulsait ses occupants et ravageait tout : de la cave au grenier, meubles, linge, papiers de famille étaient pillés, les granges étaient vidées de leur fourrage et de leur grain, les étangs de leurs poissons, portes et fenêtres étaient brûlées ou arrachées.

M. de Saint-Flovier ne put faire déloger les assaillants et dut traiter avec eux. La justice, souvent lente, comme on sait, n’informa que quatre ans plus tard (1593) et pour l’ordre d’arrestation il fallut encore onze ans (1602) : au moins avons-nous tous les détails de l’agression avec des témoignages accablants contre Françoise de Boisé… qui ne fut pas inquiétée. Après les guerres civiles, le bon roi Henri prêchait l’apaisement et l’oubli. Le château fut habité jusqu’en 1675, puis la famille se transporta à Beauregard.

Au fil de la mémoire
Pour l’oubli, c’était sans compter avec les historiens ! En 1902, Hubert publie son monumental « Canton d’Ardentes » qui raconte l’affaire. François Stanislas Honoré, marquis de Boisé de Courcenay, la détaille au moyen des archives familiales (1925). Et le curé de Velles en fait un roman, « Mademoiselle de La Motte » (1948). En bon psychologue, il pensait que Françoise de Boisé avait agi par dépit amoureux envers son beau-frère : cela donne un mobile à l’action.

La municipalité de Velles a décidé de mettre en scène cet événement pittoresque. L’association Festi’Velles  présentera « Mademoiselle de La Motte, l’Insoumise » les 5-6-7-8 juillet 2013 dans les prés sur les bords de la Bouzanne. Elle a invité un lointain descendant de la famille, M. Eric de Boisé de Courcenay, qui retrouvera cet épisode de la saga familiale sans rancune pour son arrière-grand-tante. Et les Berrichons et leurs hôtes revivront, sans risque pour les personnes ni les biens, nos lointaines guerres civiles.

Marc du Pouget
Directeur des Archives départementales et du Patrimoine historique de l'Indre

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