Boulevard des airs - 21 août

Peut-on se moquer de tout quand on a 20 ans, au nom de la jeunesse, de ses excès et de son insouciance ? Ou, au contraire, doit-on mettre toutes ses forces et ses rêves à braver les idées reçues, décider de son propre chemin, parce qu’on a envie de vivre, d’aimer et de ne pas mourir trop vite ?

Boulevard des Airs a choisi de ne pas choisir, ou plutôt de tout choisir, en composant et en interprétant une musique faite d’irrévérences et de jouissances, de questionnements et de réflexions, de refrains à reprendre à tue-tête. Des chansons ancrées dans le temps présent, où pourtant dansent et se mêlent le demain et l’avant, et puis surtout des mots qui jaillissent, ironiques et tendres, des mots qui font mouche et des mots qui caressent, qui parfois se font presque silencieux, mais qui disent toujours beaucoup.

Boulevard des Airs est le pari audacieux d’une bande de copains venus du Sud Ouest de la France, là où des valeurs comme la solidarité et le partage ne sont pas vides de sens. Une bande à part, 8 au total, âgés de 19 à 25 ans, qui ont grandi entre mer et montagne, dans des bleds écrasés de soleil, où chacun se connaît. C’est dans cette bulle que Florent et Jean-Noël, les 2 frères, mais aussi Sylvain, Laurent, Kevin, Alix, Jean-Baptiste et Manu ont appris l’amitié et la musique. Certains se connaissent depuis toujours ou presque, et c’est sous leur impulsion que BDA est né, il y a 7 ans.

La bulle éclate au sortir de l’adolescence, les confrontant aux 1ères désillusions, aux 1ères révoltes, tout en cimentant leur complicité et leur passion commune. Auteurs, compositeurs, interprètes, et multi-instrumentistes (Florent au chant, guitare, trompette, Sylvain au chant, accordéon et piano, Jean-Noël à la guitare, Laurent à la basse, Alix à la batterie) et portés par un esprit de compétition hérité du sport (le rugby et les sports de glisse), c’est l’envie de mieux faire qui les motive en permanence, notamment eu égard à leurs prestigieux ainés. Le groupe revendique pêle-mêle des influences diverses mais proches ; Brassens, Brel, Marley, Red Hot Chili Peppers ou Rage Against the Machine. Et si leur musique est différente et originale, ils ne cachent pas leur sympathie pour des groupes comme Les Ogres de Barback, Babylon Circus, les Hurlements de Léo, et le nomade chantant Manu Chao. Ce dernier et ses musiciens ont même croisé leur route à plusieurs reprises, leur prodiguant avec bienveillance conseils et souvenirs.

Aussi, après avoir écumé les scènes locales, BDA assure bientôt des 1ères parties remarquées. Entre temps, le groupe mûrit, s’étire, se rétrécit, se trouve enfin, notamment avec l’arrivée d’une section cuivre (Manu à la trompette, Jean-Baptiste au trombone, Kevin au saxophone et clarinette). Car la récompense suprême est sans hésiter la performance live, où ces amoureux de la nature partagent à chaque fois un moment unique avec le public, où la chanson française télescope le rock, le reggae flirte avec le jazz, le tout emporté par des rythmes de fanfares balkaniques.

BDA a vite compris que leur musique était une formidable machine à émotions, et, au-delà du pur plaisir de jouer ensemble, la possibilité de délivrer des messages, simples et sincères, sur leur vision du monde, une vision poétique et rugueuse à la fois, terriblement vivante.

A l’heure de leur 1er album, Paris-Buenos Aires, qui sonne comme une invitation au voyage, le groupe garde cependant la tête froide et une certaine candeur propre à leur âge. Ils ont aménagé une grande baraque, ouverte aux 4 vents, aux amis et musiciens de passage, lieu de vie, de création et de travail, où les chansons naissent et grandissent, chacune à leur propre rythme. Un port d’attache où les fous rires couvrent les engueulades, où l’inspiration se dessine en mots et en musique ; faits divers ou vécus, histoires personnelles ou entendues, et qui s’animent sous la plume de Sylvain, qui leur donnent la chaleur de l’intimité partagée et la justesse d’un regard ami. Le nom-même du groupe, Boulevard des Airs, sonne comme un hommage aux chansons populaires, simples en apparence et profondes dans les valeurs qu’elles transmettent. Et puis il fallait bien un boulevard pour faire circuler toutes ces influences, cette énergie, un boulevard pour danser, sauter, chanter, emplir l’espace...

Quant au 1er titre extrait de l’album, Cielo Ciego, la mélodie vous semblera à coup sûr familière, parce que BDA a le don de composer des morceaux qui s’immiscent à l’instant dans la tête et le cœur. San Clemente, Au Fil des Mots, mais aussi Belgrade, Des Broutilles, Cartons Roses, Paris-Corbeil, autant de titres imparables, où cohabitent ce qui fait l’essence-même de BDA, leur talent éclatant bien sûr, mais aussi la fougue de leur jeunesse, et la sagesse de leurs vieilles âmes.

Il était temps.

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